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Protection du génome humain par le Conseil de l’Europe

Doc. 9002

19 mars 2001

Protection du génome humain par le Conseil de l’Europe1

Avis

Commission des questions juridiques et des droits de l’homme

Rapporteur: M. Michael Asciak, Malte, Groupe du parti populaire européen

I.        Conclusions de la commission

1.        La commission des questions juridiques et des droits de l’homme approuve le projet de recommandation proposé dans le document 8901 par l’ancienne commission de la science et de la technologie. La commission est aussi entièrement d’accord avec les points ci-dessous:

a)       tous les pays d’Europe devraient se doter d’une autorité nationale chargée de rester vigilante, de donner des informations et des conseils quant à la conformité des recherches sur le génome humain avec les principes éthiques et moraux universellement reconnus que sont le respect de la vie et de la dignité humaine;

b)        un organe ou une autorité européen(ne) permanent devrait être institué(e) au sein du Conseil de l’Europe pour jouer le même rôle que celui énoncé au point (a) ci-dessus, en veillant tout spécialement aux aspects éthiques. La consultation de cette autorité européenne serait obligatoire, et cette dernière serait mandatée pour réglementer et inspecter tous les établissements de recherche européen, publics et privés. Cette institution collaborerait avec les organes nationaux pour assurer la mission importante que constituent l’éducation du public et la communication des informations correctes et complètes aux médias et à certaines professions comme celles de la santé, ainsi qu’aux décideurs politiques;

c)       alors que la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine du Conseil de l’Europe est achevée depuis 1996, de nombreux pays membres de l’Organisation et d’autres Etats qui pourraient la signer ne l’ont pas encore fait. Il est vital que les Etats membres du Conseil de l’Europe adhèrent à cette convention, et les membres de l’APCE peuvent jouer un rôle important en insistant auprès de leurs gouvernements respectifs pour que ces derniers la signent et la ratifient.

2.        La commission des questions juridiques et des droits de l’homme souhaite présenter l’amendement suivant au projet de recommandation présenté par la commission de la science et de la technologie:

Amendement

Dans le projet de recommandation, ajouter un nouvel alinéa 10.vi libellé comme suit:

“de demander à l’ensemble des Etats membres du Conseil de l’Europe qu’ils s’efforcent de modifier la loi sur les brevets pour arriver au sein des forums internationaux tels que l’OMC à une loi relative au patrimoine commun de l’humanité pour ce qui concerne la propriété des tissus et des gènes humains.”

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II.       Exposé des motifs par M. Asciak, Rapporteur

A.        Introduction

1.        La dernière vague d’événements dans le domaine de la génétique moléculaire a fortement accéléré le débat sur les questions de biotechnologie et de génétique, dont certaines pourraient supposer de graves menaces pour l’équilibre écologique de notre environnement, mais également pour la dignité de la personne humaine. L’homme peut aujourd’hui, pour la première fois depuis l’apparition de son espèce, lire et réécrire les informations relatives aux caractéristiques physiques (phénotype) qui constituent l’essence de toute créature vivante, des microbes à l’être humain. Ces informations sont encodées dans une molécule spécifique (ADN) qui forme plusieurs gènes dont l’ensemble constitue le génome ou le génotype de l’organisme concerné. Le génotype d’un organisme donné est converti en son phénotype par un mécanisme de “lecture” biochimique du génotype, qui est ensuite traduit en une synthèse de protéines structurées pour finalement produire un être vivant déterminé. Étant donné que tous les organismes vivants ont partagé la même évolution, l’on observe une forte ressemblance entre les informations génétiques de tous les êtres vivants, même entre celles des animaux et des plantes. La différence entre le génome humain et celui du chimpanzé est de moins de 1,5%! Étant donné que l’homme est considéré comme un animal, le génome humain peut, à l’instar de celui d’autres organismes, être soumis aux mêmes changements et manipulations que d’autres créatures vivantes, par le biais des modifications complexes que la biochimie peut apporter aux composés chimiques qui forment le génome. Le génome humain peut donc être lu et amendé, ce qui soulève plusieurs problèmes sur les plans de l’éthique et des droits de l’homme.

2.        A ce stade, il importe de souligner que ces nouveaux progrès de la biologie moléculaire offrent également à l’homme d’immenses perspectives dans la lutte contre plusieurs problèmes biologiques de notre environnement, ainsi que des espoirs et de nouvelles possibilités fantastiques dans les secteurs de l’agriculture, de la pharmacologie, du droit pénal et le droit d’instruction, de l’écologie et, surtout, de la médecine. Dans le domaine de la médecine, nous pourrons pour la première fois non seulement disposer d’un diagnostic précoce de nombreuses maladies, même sur un fœtus “in utero”, mais aussi véritablement “guérir” de nombreuses maladies que nous ne pouvions encore que “contrôler”, sans parler des vaccins. Tout cela serait notamment possible par le travail génétique consistant à modifier le génome d’une personne pour y effacer les gènes défectueux, ce qu’il est convenu d’appeler la “thérapie génique”.

3.        Étant donné que les gènes renferment non seulement les codes responsables de maladies, mais également ceux d’autres éléments du phénotype humain tels que l’intelligence, la personnalité, et même la couleur des cheveux et des yeux, la taille, etc., les implications éthiques pour la dignité de la personne humaine sont nombreuses.B

B.        La dignité de la personne humaine

4.        Étant donné que la personne humaine est la seule créature capable d’un comportement “rationnel” ou d’une “conscience de soi”, il est universellement admis que l’homme mérite d’être traité avec respect, conformément à la dignité que lui confère cette condition spécifique. Ceux qui justifient la dignité de la personne humaine par sa relation transcendantale avec Dieu, parce qu’ils considèrent que “l’âme” est la cause de cette conscience de soi, tiennent très certainement à ce qu’il ne soit pas porté atteinte à cette dignité. D’autres attribuent cette “conscience de soi” de l’être humain à son cerveau supérieur, c’est-à-dire à la supériorité de la structure physique et biochimique et du développement de ses tissus neuronaux par comparaison avec les autres créatures. Ils en ont tiré un point de vue séculier de la dignité de la personne humaine fondé sur le principe KANTIEN de la connaissance par l’homme de la loi naturelle, et en particulier de la loi morale naturelle. Que notre vision de la dignité de la personne humaine soit “spirituelle” ou “séculière”, il ne fait aucun doute que tous les êtres humains sont égaux du point de vue du respect que leur doivent les autres être humains et des droits fondamentaux inhérents à cette dignité.5

5.        Dans toutes les questions relatives au génome humain et aux interventions dont il fait l’objet, une considération supplante à coup sûr toutes les autres qui pourraient entrer en conflit avec elle. Le respect de la dignité de la personne humaine doit rester la valeur absolue en la matière. Ce sera certainement un des principes directeurs qui aideront à trancher dans les débats sur l’opportunité d’entreprendre ou non des travaux sur le génome humain. Plusieurs auteurs tendent à simplifier ce choix en se prononçant en faveur de toute option de traitement, comme celle qui vise à guérir des maladies génétiques, mais en s’opposant à toute procédure destinée à améliorer le physique des personnes, comme la couleur des yeux, la peau, la taille ou l’intelligence. La réalité nous apprend que cette dichotomie propose certes une bonne ligne de conduite en général, mais qu’elle ne permet pas toujours d’opérer une distinction assez fine pour permettre de décider si une thérapie donnée est indiquée ou non. Ainsi, le fait d’être de petite taille peut engendrer une anxiété et une dépression graves chez les membres d’une société où les personnes de grande taille sont admirées. Dans un tel cas, la thérapie génique sortirait du cadre esthétique pour devenir une application thérapeutique. En toute circonstance, le meilleur critère reste la préservation de la dignité de la personne humaine. Une option est-elle bénéfique ou nuisible à la dignité d’une personne donnée? Telle est la question fondamentale que nous devons tous nous poser. Comme l’indique clairement le rapport de la commission de la science et de la technologie, les menaces pour la dignité de la personne humaine ne proviennent pas simplement des questions de thérapie, mais également de procédures dans le domaine des tests génétiques, de ce qu’il convient de faire des résultats, des informations à communiquer aux patients et aux personnes concernées parmi leurs proches, et de l’opportunité d’accorder ou non à la société un accès aux résultats.

6.        De tels tests peuvent avoir des conséquences dévastatrices sur les droits individuels s’ils sont utilisés à de mauvaises fins dans les domaines des assurances, de l’emploi ou de l’éducation. Pour leur application à la période périnatale, il convient de se poser plusieurs questions, et d’y répondre, notamment sur le plan des droits des parents à les demander, et sur la manière de traiter les situations qui en résultent. Bien évidemment, la plus grande menace est celle qui pèse sur la dignité de la personne humaine présente sous la forme d’un fœtus pour lequel le diagnostic révèlerait un défaut de quelque ordre que ce soit. En premier lieu, un tel diagnostique prénatal peut altérer notre perception de la valeur des personnes handicapées dans la société et fausser notre conception de la perfection humaine dans la société moderne. D’autre part, il constitue une menace pour l’intégrité physique du foetus, car l’avortement légal ou non s’offrira dès lors comme une option viable aux parents, même si la tare génétique constatée est mineure! C’est pourquoi il ne faut pas sous-estimer l’importance d’associer systématiquement ces tests à une orientation par des généticiens professionnels.

7.        Il est un autre problème qui pourrait porter atteinte à la dignité humaine. En effet, à présent que le «Human Genome Project» est sur le point d’aboutir, il se pourrait que les informations qu’il a permis de réunir soient détournées par une appropriation sous forme de “brevets” qui permettraient l’exploitation commerciale de la découverte de ces gènes, et feraient tomber ces données entre les mains de multinationales, au détriment des particuliers et des groupes ethniques. Il en résulterait également un transfert des informations et des investissements des pays en développement vers les pays développés, et donc une aggravation du fossé Nord/Sud en matière de développement économique. S’agissant du génome humain, et par extension de celui d’autres créatures vivantes, le problème peut être résumé à deux questions simples: la première concerne la propriété des gènes humains, et la deuxième la propriété de tissus humains vivants comme les cellules.

8.        La possibilité de revendiquer un droit de propriété sur des gènes humains a été écartée par la Déclaration de l’UNESCO sur le génome humain et par d’autres textes, mais plusieurs sociétés de biotechnologie poursuivent leurs efforts pour faire breveter des séquences de gènes dont l’utilité est inconnue, baptisées “c-DNA”. L’Union européenne a interdit ce type de brevets, mais la situation n’est pas aussi claire dans d’autres pays.

9.        Il est également nécessaire de décider s’il est admissible que des brevets soient déposés sur des choses vivantes. En général, le problème concerne le brevetage de plantes et d’animaux, une pratique qui est désormais acceptée en droit, mais il reste le problème des tissus humains séparés du corps d’origine et intervenant dans des procédés techniques, qui pourraient être brevetés. Beaucoup de gens pensent que les choses vivantes devraient être régies non par les lois sur les brevets, mais par le droit commun. Cet état de choses devrait incontestablement être pris en compte pour les tissus d’origine humaine, qui sont des tissus vivants. Certaines personnes ont proposé d’étendre les droits conférés par un brevet non seulement à l’inventeur mais encore à la source humaine des cellules. Je pense toutefois qu’en droit commun, les deux peuvent prétendre à une compensation financière sans nécessairement posséder un droit de propriété des cellules proprement dites. Il convient de distinguer entre le dépôt d’un brevet sur un gène, qui est un produit chimique, même s’il renferme des informations extrêmement sensibles, et le dépôt d’un brevet sur une lignée cellulaire humaine vivante, par exemple de la moelle épinière ou du foie d’une personne. Je pense certes qu’il convient d’appliquer le droit public aux deux situations, mais la propriété de cellules vivantes humaines pose, à mon avis, des questions beaucoup plus dérangeantes sur le plan de la dignité fondamentale de la personne humaine!

C.        Instruments juridiques (conventions internationales)

10.        A ce stade, il serait utile de se pencher sur les instruments juridiques internationaux et européens qui touchent au génome humain.

i.       La Déclaration de l’UNESCO sur le génome humain

11.        Cette “Déclaration” n’est pas un traité, mais elle souligne les obligations morales sur lesquelles les Etats signataires se sont mis d’accord quand ils ont étudié la question. Un important article (1) de ce document déclare que le génome humain est le “patrimoine de l’humanité”, ce qui constitue une forte allusion à la notion de “droit commun” par opposition à celle de propriété. Le texte demande aussi spécifiquement aux Etats d’encourager les recherches et la coopération culturelle entre les pays industrialisés et les pays en développement (article 17). En 1998, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté cette déclaration à l’unanimité.

ii.        La Convention du Conseil de l’Europe pour la protection des Droits de l’Homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la médecine (Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine), et son Protocole additionnel portant interdiction du clonage d’êtres humains

12.        Ce jalon législatif adopté par le Conseil de l’Europe en 1997 a considérablement contribué à la protection du génome humain sous plusieurs rapports. Non seulement il introduit un protocole formel sur le consentement et sur la protection des personnes qui ne sont pas en mesure de donner leur consentement, mais il souligne également la primauté de l’être humain dont l’intérêt doit prévaloir sur le seul intérêt de la société ou de la science. Il établit le droit à la vie privée et à l’information ainsi que le critère de la non-discrimination en raison du patrimoine génétique. Il définit également les conditions dans lesquelles il pourra être procédé à des tests génétiques prédictifs, sous réserve d’un conseil génétique, et les raisons pour lesquelles une intervention sur le génome humain pourra être entreprise. Le choix du sexe de l’enfant est interdit. La Convention interdit également la constitution d’embryons humains aux fins de recherche, et assure une protection adéquate de l’embryon lorsqu’une telle recherche est admise par la loi. Le protocole additionnel interdit le clonage du génome humain dans quelque situation que ce soit, qu’il poursuive ou non des fins reproductives ou thérapeutiques.

iii.        Accord de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC)

13.        La Partie II section 5 de cet Accord porte sur les dispositions adoptées au plan international définissant la réglementation des objets brevetables. Les articles 27, 28 et 29 de l’Accord signé par tous (ou la plupart de) nos gouvernements nationaux énoncent les conditions de brevetabilité des produits et des procédés (invention nouvelle, impliquant une activité inventive et susceptible d’application industrielle) ce qui exclut le dépôt d’un brevet pour une simple découverte comme celle de c-DNA. Ils prévoient également la possibilité pour les Etats d’exclure de la brevetabilité les inventions pour protéger l’ordre public ou la moralité s’ils l’estiment nécessaire. Les Membres pourront également exclure de la brevetabilité les méthodes diagnostiques, thérapeutiques et chirurgicales pour le traitement des personnes ou des animaux, tout comme les végétaux entiers et les animaux autres que les micro-organismes.

iv.        La Convention des Nations Unies sur la diversité biologique (CDB)

14.        Cette convention signée en 1992 renferme certaines dispositions intéressantes pour le sujet qui nous occupe. L’Article (1) prévoit “le partage juste et équitable des avantages découlant de l’exploitation des ressources génétiques”. L’Article (8j) “encourage le partage équitable des avantages découlant de l’utilisation de ces connaissances, innovations et pratiques” avec les communautés autochtones et locales. L’Article 16 stipule que “lorsque les technologies (y compris les biotechnologies) font l’objet de brevets et autres droits de propriété intellectuelle, l’accès et le transfert sont assurés selon des modalités qui reconnaissent les droits de propriété intellectuelle et sont compatibles avec leur protection adéquate et effective”. Les articles 19, 20 et 21, sur la gestion de la biotechnologie et la répartition financière de ses avantages, sont également pertinents.

v.        Directive 98/44/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 juillet 1998 “relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques”

15.        En 1998, et conformément à ses obligations internationales dérivées des points 3 et 4 ci-dessus, l’Union européenne a adopté (par codécision du Parlement européen et du Conseil) la Directive 98/44/CE “relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques”. Ce texte qui sert de référence n’est certes pas parfait et ne satisfait pas tout le monde, mais il constitue un compromis historique entre le Parlement européen et la Commission et le Conseil, avec de nombreux “allers et venues”. Il rend effectivement possible le brevetage de matière biologique et d’inventions biotechnologiques, y compris les procédés industriels faisant intervenir les gènes humains et leurs produits. La directive présente une longue liste de matières biologiques qui sont exclues de la brevetabilité en raison de l’éthique, ce qui constitue un de ses meilleurs atouts.

16.        Elle exclut de la brevetabilité des variétés végétales et des races animales ainsi que des procédés essentiellement biologiques d’obtention de végétaux ou d’animaux. Le corps humain, dans toutes les phases de sa constitution et de son développement, ainsi que la simple découverte d’un de ses éléments ou d’une séquence de gènes, ne sauraient être brevetables. Des éléments isolés peuvent toutefois être brevetables s’ils sont isolés du corps humain ou produits par des procédés techniques, à condition de répondre aux critères de nouveauté, d’activité inventive et d’application industrielle. Cela signifie que des gènes peuvent être brevetés dans ces conditions, tout comme des tissus humains vivants et des lignées cellulaires extraites du corps, à condition qu’ils aient une application industrielle. Leurs produits sont également brevetables (ex: insuline ou hormone de croissance).

17.        Les “inventions dont l’exploitation commerciale serait contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs” sont une fois de plus déclarées non brevetables, et notamment les procédés de clonage des êtres humains, les procédés de modification de l’identité génétique germinale de l’être humain et les utilisations d’embryons humains à des fins industrielles ou commerciales. Cette exclusion s’applique également aux procédés de modification de l’identité génétique des animaux de nature à provoquer chez eux des souffrances inutiles.

vi.        Convention sur la délivrance de brevets européens (CBE)

18.        Le 16 juin 1999, le Conseil d’administration de l’Office européen des brevets (OEB) a décidé d’endosser un nouveau chapitre VI intitulé “Inventions biotechnologiques” qui entérine les conclusions de la Directive de l’UE ci-dessus.

vii.       Autres instruments juridiques

a.        Recommandations de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe

19. L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a adopté pour sa part deux recommandations, l’une traite des biotechnologies et de la propriété intellectuelle (Rec. 1425 de 1999) et l’autre des biotechnologies en général (Rec. 1468 de 2000). Ces deux recommandations ont révélé que l’Assemblée désapprouvait le brevetage de matière vivante en général et le système de brevetage des gènes (et de gènes humains en particulier). C’est pourquoi l’Assemblée a logiquement proposé que les gouvernements des Etats membres du Conseil de l’Europe œuvrent en faveur de l’adoption universelle d’un nouveau système, une “Convention du brevet mondial”, qui serait mise en place sous l’égide d’une institution ou organisation internationale qui reste à définir. Cette nouvelle convention reposerait sur les principes du patrimoine commun et non, comme le fait le droit actuel sur les brevets, sur la création d’un monopole sur les gènes et la matière vivante. Une telle démarche exige un travail systématique et de la persévérance.

b.        Autres travaux du Conseil de l’Europe sur le génome humain

20. Notre propos serait incomplet si nous passions sous silence d’autres travaux du Conseil de l’Europe, et en particulier ceux qui portent sur le génome humain. Le Comité directeur pour la bioéthique (CDBI) s’efforce actuellement, par le biais de son Groupe de travail sur la génétique humaine, de dresser la liste des principales questions qu’il conviendrait de traiter dans le protocole additionnel à la Convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine, relatif au génome humain (CDBI-CO-GT4). L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a lancé, par son ancienne commission de la science et de la technologie, une initiative baptisée “Euro-Forum sur la génétique humaine”. Ce forum s’efforce d’engager les citoyens de tous les Etats membres du Conseil de l’Europe dans un débat entre eux et avec leurs politiciens au niveau européen, et au sein de l’APCE en particulier, sur les questions afférentes à la génétique humaine. Il est également prévu que les médias participent à ce forum d’une manière très élaborée et complète. Les principaux objectifs du forum sont d’assister l’APCE dans son processus de décision sur le Protocole relatif au génome humain grâce à une évaluation, par un panel paneuropéen de citoyens, de la question de la génétique humaine et des domaines politiques connexes. Il vise également à élargir le débat sur la génétique humaine au-delà du Conseil de l’Europe. Ces travaux sont actuellement poursuivis par la nouvelle commission de la culture, de la science et de l’éducation.

c.        Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne

21. Dans la Charte des droits fondamentaux qu’elle a récemment adoptée, l’Union européenne a consigné noir sur blanc diverses dispositions visant à sauvegarder certains droits afférents au génome humain. L’article 1 stipule: “La dignité humaine est inviolable. Elle doit être respectée et protégée.” L’article 3 interdit spécifiquement les pratiques eugéniques et notamment celles qui ont pour but la sélection des personnes. Il interdit également de faire du corps humain et de ses parties, en tant que tels, une source de profit, ainsi que le clonage reproductif des êtres humains. Notons ici cette différence intéressante par rapport à la Convention du Conseil de l’Europe sur la bioéthique, en ce que le texte ne dit rien du clonage à des fins thérapeutiques, c’est-à-dire du clonage, aux fins de la recherche, d’embryons humains en vue d’une “cannibalisation” de certaines de leurs cellules-souches. Il s’agit pourtant de clonage humain. L’article 21 interdit la discrimination en énonçant divers motifs, au nombre desquels figurent les caractéristiques génétiques, ce qui donne le ton pour une interdiction de toute exploitation de résultats de tests génétiques se traduisant par une discrimination dans l’emploi, les assurances, la santé et l’éducation.

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Commission chargée du rapport: commission de la science et de la technologie

Commission saisie pour avis: commission des questions juridiques et des droits de l’homme

Renvoi en commission: Doc 8773 et renvoi n° 2520 du 26 juin 2000

Avis approuvé par la commission le 5 mars 2001

Secrétaires de la commission: M. Plate, Mmes Coin, Kleinsorge et M. Cupina


1 Voir le document 8901 préparé par la commission de la science et de la technologie.